Transbordeur - photographie histoire société, n° 7 Éditions MaculaTransbordeur - photographie histoire société, n° 7 Éditions MaculaTransbordeur - photographie histoire société, n° 7 Éditions MaculaTransbordeur - photographie histoire société, n° 7 Éditions MaculaTransbordeur - photographie histoire société, n° 7 Éditions MaculaTransbordeur - photographie histoire société, n° 7 Éditions Macula

Transbordeur – photographie histoire société, n° 7


Le numéro 7 de Transbordeur est consacré à l’histoire des manipulations photographiques d’où résultent des images hybrides, soit composées de plusieurs photographies, soit mêlant la photographie à d’autres techniques d’imagerie. À la suite de récents travaux interrogeant l’histoire du photomontage sur le temps long, du XIXe siècle à la culture numérique actuelle, ce numéro propose une histoire parallèle de la photographie : une histoire dans laquelle la composition prime sur l’enregistrement. En étudiant la manipulation d’images chez les graphistes, les illustrateurs et les publicitaires, il s’agit de montrer comment le matériau photographique a pu être recombiné, recomposé, ré-agencé. L’actualité des pratiques vernaculaires du montage sur Internet fait l’objet d’une attention particulière, tout autant que les usages et discours des métiers de l’imprimé et de la communication visuelle.


Studiolo, n° 18 – Dossier « Indétermination »


Le numéro 18 de la revue Studiolo, dont le dossier a pour sujet l’« Indétermination » est le deuxième opus de la collaboration entre les Éditions Macula et l’Académie de France à Rome – Villa Médicis. Studiolo, revue annuelle d’histoire de l’art, parâit depuis 2002. Cette coédition a débuté avec le numéro 17, qui a paru dans une toute nouvelle maquette en novembre 2021.
« Indétermination ». Le dossier de ce numéro interroge tout autant ce qui excède l’intention artistique d’une œuvre d’art, que les chemins empruntés par sa réception critique. Quelle est la part d’indéterminé à l’œuvre dans une production artistique ? Et comment en rendre compte sans la désavouer, sans la ramener, justement, à son état contraire : la détermination ?
Dans un rapport à l’image qui engage l’artiste, l’œuvre et le spectateur, l’indétermination peut se penser comme ce « résidu laissé inexprimé par une articulation défectueuse » qui échappe aux discours et à la représentation (G. Cassegrain).
Chaque livraison de la revue Studiolo comporte un dossier thématique, des varia, une rubrique regards critiques consacrée à l’historiographie et, dans la rubrique histoire de l’art à la Villa Médicis, une actualité des activités du département d’histoire de l’art et des chantiers de restauration de l’Académie de France à Rome – Villa Médicis. Enfin champ libre ouvre ses pages aux pensionnaires artistes de l’année en cours.


Transbordeur – photographie histoire société, n° 6


Entretien avec Joanna Schaffter au sujet de Transbordeur

L’histoire des vues aériennes est liée au développement des moyens de locomotion aériens qui, depuis le XVIIIe siècle, produisent de nouveaux points de vue fixes et mobiles sur la terre. Des premières montgolfières aux drones contemporains, les dispositifs de vision aérienne génèrent une iconographie au croisement de l’expérimentation militaire, scientifique et artistique qui nourrit depuis longtemps la culture populaire.

Le numéro 6 de la revue Transbordeur revisite cette histoire de la vue d’en haut en éclairant en particulier sa dimension politique et épistémologique. Dans cette perspective, nous privilégions la notion d’« image verticale » à celle, plus générique, de vue aérienne. Cette notion permet non seulement de renvoyer à un arrangement spatial spécifique, mais également de souligner les relations de pouvoir qui le soutiennent et le modélisent. À la fois représentation et matérialisation de rapports de domination coloniale et impérialiste ou de politiques de surveillance policière et militaire, l’image verticale est productrice d’un savoir qui forge ces rapports et les rend possibles. À l’inverse, dans une démarche militante ou citoyenne, elle peut fournir une preuve permettant d’exposer et de dénoncer la violence et l’illégalité des agressions commises par des acteurs étatiques et institutionnels.


Transbordeur – photographie histoire société, n° 5


Entretien avec Joanna Schaffter au sujet de Transbordeur

Le cinquième numéro de Transbordeur explore l’histoire des relations entre photographie et design du XIXe au XXIe siècle. Différentes thématiques sont abordées : la photographie du design et le rôle de la photographie dans les publications liées à ce champ ; les relations entre photographes et designers, notamment l’apprentissage de la photographie dans les écoles de design ; la photographie comme matériau pour le design et les usages de la photographie par les designers (collecte visuelle, expérimentations, réflexion sur le projet, exposition, archives et publicité) ; enfin, l’introduction du design dans la photographie et notamment dans le domaine des appareils photographiques. Ouverture sur des champs de recherche encore peu explorés, ce numéro veut avant tout esquisser une histoire croisée de la photographie et du design sur le temps long.
Direction de publication
Ch. Joschke et O. Lugon

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Le Culte des images avant l’iconoclasme (IVe-VIIe siècles)


Le Culte des images avant l’iconoclasme, paru en 1954 dans les prestigieux Dumbarton Oaks Papers, n’avait encore jamais été traduit en français, alors que ce texte fondateur donna l’impulsion à bon nombre de travaux portant sur le sujet. Ernst Kitzinger s’appuie sur les écrits de l’époque byzantine pour saisir l’évolution de l’imagerie chrétienne et pour montrer comment, après les reliques des saints, les images vont elles aussi être considérées comme des objets sacrés. Il y est question de la vertu curative de petits fragments d’une fresque qui représente des saints, à condition d’en avaler une décoction, ou encore d’une icône produisant une rosée qui soigne les bubons et rend la santé. Nombreux aussi sont les textes mentionnant les images « acheiropoïètes » (non faites de la main de l’homme), comme dans le cas des « impressions » du corps du Christ sur des draps de lin ou sur la colonne d’une église, qui toutes suscitent une grande ferveur parmi les croyants.

En complément de l’article a été ajouté un florilège de 43 extraits de textes de la période byzantine, que Ernst Kitzinger cite dans sa démonstration, pour la plupart peu accessibles ou non traduits. Cette édition française complétée d’une mise à jour bibliographique de Stephen Gero, spécialiste de l’iconoclasme et Professeur à l’Université de Tübingen, a été traduite de l’anglais et du grec par Philippe-Alain Michaud. Ce dernier est aussi l’auteur de la postface « L’adoration des surfaces », dans laquelle il témoigne de l’actualité de ce texte érudit qui entre en résonance avec les nouveaux régimes d’images générés par la révolution numérique.

Ernst Kitzinger (1912-2003) fut historien de l’art, spécialiste de l’Antiquité tardive, du Moyen Âge et de l’époque byzantine, professeur d’art et d’archéologie byzantins à Dumbarton Oaks, dont il a fait un centre internationalement renommé en matière d’études byzantines.


Transbordeur – photographie histoire société, n° 2


Entretien avec Joanna Schaffter au sujet de Transbordeur

Après le numéro inaugural de Transbordeur sur l’histoire des musées de photographies documentaires, le présent numéro poursuit la démarche d’une histoire matérielle de la photographie, de ses usages et des formes de sa diffusion. Le dossier, au cœur de la revue, croise différents fils autour de la question de l’exposition de la photographie : la célébration du médium lui-même, depuis la divulgation du daguerréotype jusqu’aux premières présentations de la photographie numérique, en passant par la mise en scène de son histoire ; la photographie comme pédagogie par l’image, avec la statistique visuelle, l’astronomie savamment organisée par Aby Warburg, ou encore l’exposition de la Grèce par Fred Boissonnas au lendemain de la Grande Guerre. Les exhibitions d’architecture ou les expositions itinérantes du plan Marshall nous le montrent par ailleurs, la modernité de l’exposition par la photographie c’est de n’être plus ni temple ni sanctuaire, mais de circuler d’un lieu à un autre, d’un dispositif à l’autre. Et la photographie est encore là pour partager l’expérience de l’exposition au-delà des frontières et à travers le temps : les photographies stéréoscopiques prises à l’Exposition universelle de 1867 restituèrent aux millions de regardeurs l’immense bazar où le monde entier avait envoyé ses produits, tandis que des décennies de vues d’expositions artistiques sont aujourd’hui réinterrogées par des artistes, des commissaires et des chercheurs. Dans le Japon des années 1960-1970, auquel plusieurs textes de ce numéro sont consacrés, exposition et photographie ont poussé à l’extrême les utopies post-industrielles dans le sens d’une critique du médium photographique. Lorsque le dispositif se fait discours, que l’image se fait utopie, elle ouvre un nouveau champ des possibles aux multitudes rassemblées. Exposer, en définitive, c’est construire des publics.

Ce deuxième numéro de Transbordeur regroupe une quinzaine d’articles composant un volume de 256 pages richement illustré. Il est divisé en quatre sections : un dossier thématique – Photographie et exposition – regroupant dix études ; une section « collections » où sont décrits et analysés succinctement des fonds photographiques ; une sélection d’articles libres (varia), faisant une large place aux traductions de textes de chercheurs internationaux ; une section « lectures », consacrée à des comptes rendus d’ouvrages.

Direction de publication
Ch. Joschke et O. Lugon

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Une histoire contrariée. Le musée de photographie en France (1839-1945)


Depuis la divulgation du procédé en 1839 jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, nombre d’amateurs ou de professionnels militent pour la création d’un musée de photographie. On conserve la trace de multiples projets, d’ampleurs variées qui, s’ils n’ont pas abouti, sont les lieux de cristallisation des espoirs très vite associés à la photographie. L’histoire jusqu’alors mal connue de ces divers projets est traversée par une hésitation fondamentale, liée au statut ambivalent de l’image photographique : devait-on créer un musée des photographies, pensé selon le modèle d’un musée des copies et reproductions photographiques, ou un musée pour la photographie, son histoire, sa technique, son caractère artistique ?
Éléonore Challine retrace ce lent et délicat processus de légitimation du nouveau médium au sein de la sphère institutionnelle française. Cette histoire est animée par des personnalités singulières, toutes convaincues de la nécessité de préserver la photographie et de lui donner un lieu, tels Louis Cyrus Macaire, Léon Vidal, Louis Chéronnet, Raymond Lécuyer ou encore Gabriel Cromer, dont la fabuleuse collection partit pour les États-Unis en novembre 1939 sur l’un des derniers paquebots américains quittant la France, laissant le goût amer d’une perte irrémédiable. Une galerie de portraits de ces figures oubliées s’imposait pour redonner vie et épaisseur à ce milieu qui œuvre pour le musée, excédant le strict monde « photographique ».
Conçu sous la forme d’une vaste et minutieuse enquête, à la recherche d’archives et de traces écrites ou visuelles inédites de ces projets, cet ouvrage se déroule, tel un drame bourgeois, en cinq actes. Quatre actes pour en narrer l’histoire contrariée des années 1840 jusqu’aux années 1930, puis un dernier acte sur l’histoire contournée cette fois-ci, étudiant d’une part les formes éphémères du musée photographique que sont les expositions rétrospectives et, d’autre part, ses formes portatives comme le livre.

Née en 1983, agrégée d’histoire et ancienne élève de la rue d’Ulm, Éléonore Challine est maître de conférences en histoire de la photographie à l’Université Paris 1 – Panthéon-Sorbonne. Une histoire contrariée. Le musée de photographie en France (1839-1945) est son premier livre.

Prix du musée d’Orsay
La thèse à l’origine de cet ouvrage a remporté le prestigieux Prix du musée d’Orsay 2014 qui, outre une reconnaissance institutionnelle et intellectuelle, est doté d’une subvention destinée à la publication. Le texte a fait l’objet d’un important travail de réécriture de la part de l’auteur. Depuis la reprise des éditions Macula en 2010, c’est la première fois que nous publions la thèse d’une jeune chercheuse en histoire de l’art, signe d’un désir plus global d’accompagner la recherche d’aujourd’hui.
Nouvelle collection Transbordeur
Cet ouvrage inaugurera une nouvelle collection dirigée par Olivier Lugon et Christian Joschke, pensée en écho au travail entrepris au sein de la revue Transbordeur, dont le numéro 1 a paru en février dernier. Chaque livre de la collection sera un complément, un approfondissement, un zoom sur une thématique particulière ou un aspect de la photographie envisagée dans sa matérialité et dans son contexte socio-historique. Ainsi Éléonore Challine figurait au nombre des contributeurs de ce numéro inaugural de Transbordeur avec un article sur l’histoire du Musée des photographies documentaires (1894-1907).


Transbordeur – photographie histoire société, n° 1


Entretien avec Joanna Schaffter au sujet de Transbordeur

La diffusion de la photographie, l’invention du cinéma et le développement d’appareils à enregistrer le son ont permis la création d’un volume considérable d’images fixes, d’images animées et d’enregistrements sonores à travers le monde à la fin du XIXe siècle. Différentes institutions ont alors été fondées pour collecter et archiver ces matériaux afin de garder des traces visuelles et sonores de l’histoire, de la géographie et des phénomènes sociaux observés à un niveau local, national ou mondial. Ce numéro revient sur ce bouillonnement – sur ses acteurs, ses réseaux, sur leurs visées scientifiques, éducatives, patrimoniales et politiques, ainsi que sur les nouvelles façons de penser l’archive, les collections et le musée qu’ils mirent en place.

Transbordeur est une revue d’histoire de la photographie. Elle s’adresse à tous ceux qui sont intéressés par les images, leur histoire, leur sociologie, leur évolution technique, leurs significations et matérialités multiples, leur rapport au temps et à l’histoire, leur circulation ; à tous ceux qui veulent comprendre le monde contemporain à travers l’histoire de la culture ; à tous ceux qui jettent un regard critique et curieux sur les phénomènes visuels qui les entourent. Plutôt que d’approcher la photographie d’un point de vue strictement esthétique, la revue Transbordeur a pour ambition de montrer sa place dans toutes les activités de la société, d’analyser comment elle a transformé en profondeur notre rapport au monde. La photographie s’est imposée en effet dans l’école, la science, l’art, l’information, le commerce, la politique, l’industrie, la guerre, les transports, l’espace privé et public. Elle s’est étendue au livre et à la presse, à la scénographie d’exposition et au cinéma, à la production des savoirs, à la prose et à la poésie. Ce sont tous ces aspects de notre culture de l’image qu’il s’agit de comprendre et d’analyser.

Le présent numéro de Transbordeur regroupe une quinzaine d’articles composant un volume de 236 pages richement illustré. Il est divisé en quatre sections : un dossier thématique – Musées de photographies documentaires – regroupant huit études ; une section « collections » où sont décrits et analysés succinctement des fonds photographiques, faisant une large part aux archives et musées ; une sélection d’articles libres (varia), faisant une large place aux traductions de textes de chercheurs internationaux ;  une section « lectures », consacrée à des comptes rendus d’ouvrages.

Le titre de notre revue évoque le passage entre les rives, la traversée des frontières disciplinaires comme nationales. Il renvoie au pont transbordeur de Marseille, perçu par l’avant-garde des années 1920 tout à la fois comme un produit de la technique, un instrument de vision et un objet d’expérimentations photographiques. L’imaginaire de la mobilité et du décloisonnement qu’il mobilisait a pu devenir aussi un programme pour l’écriture même de l’histoire des images et des infrastructures techniques, projet qui porte également cette nouvelle revue.

Direction de publication
Ch. Joschke et O. Lugon

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Figures pissantes, 1280-2014


Un livre impertinent et érudit.

Sous le titre intrigant de Figures pissantes se cache une étude remarquable et non dépourvue d’humour sur les représentations de personnages – petits et grands – en train d’uriner. Jean-Claude Lebensztejn part d’un détail qui, s’il peut sembler négligeable (les putti urinant  sont souvent cachés dans un petit coin de grandes œuvres), propulse le lecteur dans les représentations des figures pissantes de l’Antiquité tardive à nos jours : l’urine y passe du statut de l’acqua santa du bébé à celui de vecteur de la profanation et de la dépravation.

Le texte s’ouvre sur l’iconographie joyeuse et festive du puer mingens, que l’on retrouve sur les sarcophages romains, dans le Songe de Poliphile, chez les putti de la Renaissance. Puis apparaît peu à peu l’adulte pissant, d’abord en toute  innocence, comme chez Rembrandt,  avant que n’émergent doucement des représentations dans lesquelles l’érotisme n’est pas absent, comme celles un peu voyeuses de Boucher et sa Femme qui pisse (appelée aussi très à propos L’Œil indiscret), des pisseuses de Picasso ou celles de Gauguin. Au cours du XXe siècle, le statut de l’urine et celui du pisseur (et de la pisseuse) se modifient encore plus profondément, allant jusqu’à la revendication, au défi, voire à la déviance : des artistes comme Otto Muehl, Andres Serrano, Sophy Rickett ou Andy Warhol seront les fers de lance de ce basculement.

L’iconographie témoigne d’une extraordinaire curiosité : bien connues ou dénichées au fond d’un coffre aux trésors par Jean-Claude Lebensztejn (ou ses amis, qui se sont pris au jeu en lui indiquant des pisseurs ou pisseuses à travers les siècles), les 161 illustrations de ce livre, parfois naïves, parfois polissonnes, parfois agressives, forment un corpus foisonnant nous transportant de l’innocence à l’indécence.

La force de ce texte ciselé réside dans ce mélange subtil, propre à l’auteur, qui détourne les études de cas iconologiques pour arpenter avec nous des siècles de « fantaisies diurétiques », teintées de poésie et de politique.

Jean-Claude Lebensztejn est historien, théoricien, critique d’art et écrivain. Il est Professeur honoraire de l’Université Paris 1 – Panthéon-Sorbonne. Parmi ses nombreuses publications, citons Déplacements, Presses du réel (2013) ; Manières de table, Bayard (2004) ; Malcolm Morley : itinéraires, Mamco (2002), L’Art de la tache, Éditions du Limon (1990).


Sur le film


“Cinéma est un mot grec qui signifie « mouvement » [movie]. L’illusion du mouvement est certainement le complément ordinaire de l’image filmique, mais cette illusion repose sur la certitude que la vitesse à laquelle se succèdent les photogrammes n’admet que des variations très limitées. Rien dans l’agencement structural du ruban filmique ne peut justifier une telle certitude. C’est pourquoi nous la rejetons. Désormais, nous appellerons notre art simplement : le film.”
Hollis Frampton, Pour une métahistoire du film
Ce livre propose une lecture rétrospective, non linéaire et décentrée de l’histoire des images en mouvement : il s’appuie sur une analyse de la pensée filmique telle qu’elle se déploie, indépendamment de ses applications techniques, dans l’histoire des représentations, et constitue un repérage de la manière dont les propriétés du film, disjointes de l’appareil qui conditionne le spectacle cinématographique, agissent dans les différents champs des pratiques artistiques.

Les premiers chapitres analysent la manière dont le film est né de la déconstruction de l’espace et des catégories à partir desquels la forme-cinéma s’est instituée ; les suivants s’attachent à décrire comment artistes et cinéastes, au fil de la période moderne et contemporaine, ont disjoint les propriétés du film – lumière, durée, mouvement – et séparé ses éléments constitutifs – photogramme ou ruban de photogrammes, faisceau, surface de projection… – pour les réagencer en d’autres configurations. Ce changement de perspective dont on n’a pas fini de mesurer les effets nous oblige à une lecture rétroactive de l’histoire du film tout entière, en même temps que celle de son intégration à un système des arts qu’il transforme en retour. Ce qu’on appelle improprement « cinéma expérimental » apparaît désormais comme la trace, tout au long du XXe siècle, du fait que l’expérience du film ne se confond pas avec l’histoire de sa dématérialisation : face au spectacle de cinéma traditionnel moulé dans l’espace du théâtre classique, du film avant-gardiste des années 1920 à l’expanded cinema des années 1960, jusqu’au film d’artiste contemporain, le style « expérimental » aura été une façon de repenser l’histoire des images en mouvement en suggérant d’autres généalogies et selon d’autres concepts.

Face au dispositif spatial dans lequel s’est reconnu et s’est déployé le cinéma moderne (des spectateurs immobiles dirigeant leur regard vers un écran conçu comme une surface transparente) et à partir duquel il a produit ses propres régimes d’intelligibilité, se dessine une autre manière de penser le film : un film despécifié, émancipé des lois de la théâtralité et de celles de la photo-impression, un dispositif de transfert généralisé engendrant des phénomènes de comparution.

Philosophe et historien de l’art, Philippe-Alain Michaud s’intéresse particulièrement aux relations entre film et histoire de l’art. Conservateur chargé du département film du Centre Georges Pompidou, il est professeur à l’École de recherche graphique (ERG – École Supérieure des Arts) de Bruxelles. Parmi ses publications : Aby Warburg et l’Image en mouvement (Paris, Macula, 1998) ; Le Peuple des images (Paris, Desclée de Brouwer, 2002) ; Filme: Por Uma Teoria Expandida do Cinema (Rio, Contraponto, 2014).