Le Retour de Rodin Éditions Macula

Le Retour de Rodin


Jusqu’au milieu des années cinquante, l’œuvre de Rodin était surannée pour un regard moderne. On ne connaissait presque de lui que ses marbres sirupeux. Or voici qu’un livre américain a transformé le regard qu’on portait sur le célèbre sculpteur français. Avec Steinberg, le retour que Rodin effectue dans le giron de la modernité est définitif. Oubliez les marbres, commence-t-il par dire : la plupart ne sont même pas de la main du sculpteur mais taillés par des artisans à sa solde, certains même sont posthumes. Laissez de côté la production sentimentale de Rodin entrepreneur, la partie visible et commerciale de l’iceberg, et regardez le sculpteur au travail. Fragmentation et multiplication, combinaison et inversion, distorsion et déplacement : Rodin est un structuraliste avant la lettre, décomposant et recomposant les membra disjecta du corps humain comme autant d’éléments propres au langage de la sculpture.
De ce que l’on considérait jusqu’alors comme le point terminal et grandiose de l’histoire de la sculpture du dix-neuvième siècle, Steinberg fait ce qui ouvre celle de notre temps : Rodin redevient notre contemporain.

Leo Steinberg (1920-2011) a réalisé de nombreuses études sur Filippo Lippi, Mantegna, Léonard, Michel-Ange, Pontormo, Le Guerchin, Jan Steen, Vélasquez et Picasso. Outre La Sexualité du Christ dans l’art de la Renaissance et son refoulement moderne, traduit en français en 1987 (Gallimard), ses publications comptent une anthologie d’essais sur l’art contemporain (Other Criteria, 1972), une analyse des dernière œuvres picturales de Michel-Ange (1975) et du symbolisme trinitaire de Borromini (1977).


Lord Elgin


« Stupide spoliateur, misérable antiquaire aidé de ses infâmes agents» (Byron), «bienfaiteur de la nation anglaise, rénovateur du goût » (Benjamin West) – la personnalité fascinante de Lord Elgin résume à elle seule l’épopée archéologique du XIXe siècle.
Elgin sauva-t-il de la «barbarie» turque les admirables sculptures de Phidias aujourd’hui conservées au British Museum ? Commit-il un sacrilège en dépouillant un monument illustre qui avait résisté vingt-trois siècles aux assauts du temps et des hommes ? C’est la question que pose ce livre. Il raconte comment, au hasard des renversements d’alliances et des coups d’éclat militaires de Bonaparte ou de Nelson, deux équipes d’« archéologues » anglais et français (des hommes d’action, des aventuriers) se disputent les chefs-d’œuvre de l’Acropole sous l’œil tour à tour sourcilleux et perplexe de l’occupant turc.
Comment ils arrachent les métopes, scient les corniches, descellent les sculptures géantes des frontons, comment ils parviennent en pleine guerre à transporter leur butin jusqu’à Londres ou Paris.
Comment on les y accueille, et comment Elgin, si avide qu’il était d’apporter à l’Angleterre le supplément d’âme qui ferait d’elle une grande nation créatrice, finira ruiné, trompé, amer, accablé sous le poids de ces pierres qu’il croyait avoir rendues à la culture occidentale.


Passages


Qu’est-ce que la sculpture moderne ?
L’historienne de l’art américaine Rosalind Krauss répond en sept chapitres incisifs : la production sculpturale du XXe siècle se définit par le nouveau type de rapports qu’elle engage avec le spectateur. Une sculpture est moderne si elle refuse de faire appel à ce qui est au-delà de sa surface, si elle offre une stratégie efficace pour déjouer l’illusionnisme (tenace depuis l’Antiquité grecque) qui incitait le spectateur à supposer au cœur de l’œuvre un quelconque centre ou noyau – intériorité psychologique ou ossature anatomique.

Ce parcours de la sculpture moderne débute avec Rodin, qui détruit tout à la fois l’unité de l’espace narratif (avec La Porte de l’Enfer) et le postulat analytique (avec le Monument à Balzac). Rosalind Krauss examine ensuite le cubisme et son héritage constructiviste, poursuit avec Brancusi et Duchamp, puis avec une analyse de l’apport du surréalisme dans le domaine de la sculpture. Les trois derniers chapitres concernent la période allant de l’après-guerre au début des années soixante-dix. De David Smith à Anthony Caro, des happenings aux volumes minimalistes, des empilements de Richard Serra à la Spiral Jetty de Robert Smithson, peu à peu, c’est une esthétique du décentrement propre à notre modernité qui s’affirme.

Une synthèse remarquable dans laquelle Rosalind Krauss déploie tour à tour son aptitude à l’analyse formelle des œuvres et sa capacité à resituer l’art contemporain dans le champ général du savoir.

Avec 171 illustrations.

Rosalind Krauss (née en 1941) occupe la chaire d’histoire de l’art moderne et contemporain à l’université Columbia (New York). On lui doit quantité d’articles sur l’art moderne et le post-modernisme. Trois autres de ses livres sont publiés aux éditions Macula : Le Photographique (1990), L’Originalité de l’avant-garde et autres mythes modernistes (1993) et Les Papiers de Picasso (2012).


Lettres à Miranda


Qu’est-ce que l’œuvre d’art ?
Peut-on impunément arracher l’œuvre d’art à son milieu géographique et historique, esthétique, sociologique ? En s’élevant dans ses Lettres à Miranda (1796) contre la politique de spoliation voulue par le Directoire et menée à bien par Bonaparte en Italie, Quatremère de Quincy prend parti dans une querelle nationale. D’un côté ceux qui veulent prélever dans toute l’Europe et ramener de force à Paris les plus grands chefs-d’œuvre pour faire de la capitale révolutionnaire l’héritière d’Athènes et de Rome ; de l’autre ceux pour qui l’œuvre ne prend sens que du contexte où elle se déploie.
Théoricien prolifique du néoclassicisme, Quatremère de Quincy (1755-1849) est notamment l’auteur des Considérations sur les arts du dessin, d’un Dictionnaire de l’architecture et d’un Canova.

Auteur de l’introduction, Édouard Pommier, archiviste-paléographe, agrégé d’histoire et ancien membre de l’École française de Rome, a été inspecteur général des musées de France dès 1983. Spécialiste de l’histoire des théories et des institutions artistiques, il a publié notamment, aux éditions Gallimard, L’Art de la liberté, Théories du portrait. De la Renaissance aux Lumières et Winckelmann, inventeur de l’histoire de l’art.
Emmanuel Alloa, auteur de la postface, est maître de conférences en philosophie à l’Université de Saint-Gall. Ses recherches se situent à l’intersection de la phénoménologie, de l’histoire des idées et de l’esthétique. Parmi ses dernières parutions en français, citons Penser l’image III. Comment lire les images ?, Presses du réel (2017), ainsi que la traduction de Chose et medium de Fritz Heider, Éditions Vrin (2017).


Qu’est-ce que la sculpture ?


En racontant l”histoire de la statuaire depuis les premiers kouroï grecs jusqu’à Brancusi, l’auteur ne se contente pas de décrire la constitution matérielle des œuvres, leur état physique. Il analyse ces données techniques et ces conditions de production du point de vue de l’esthétique : pourquoi l’artiste choisit tel matériau, tel instrument, tel type de jointoiement ou de report, et en quoi ces procédures conditionnent à leur tour sa visée artistique.

Quel était le rôle de la vitesse dans le modelage par le Bernin de ses célèbres bozzetti ? Et pourquoi Canova lissait-il ses marbres ? Que signifie le creusement des pupilles ? Quand s’autorise-t-on à fabriquer des œuvres en combinant plusieurs blocs ?

Quels sont les effets d’un trépan, qui vrille et creuse la pierre (Michel-Ange n’en voulait pas), ou d’une gradine, qui la laboure (c’était son instrument favori) ? En quoi les pantographes et autres appareils de transfert ont-ils déplacé l’intérêt du sculpteur en deçà du marbre vers la maquette originelle en plâtre ?
Pour répondre à ces questions, Wittkower examine tour à tour 192 sculptures célèbres.

Rudolf Wittkower (1901-1971) a publié aux éditions Macula Les Enfants de Saturne et aux éditions Hazan Art et architecture en Italie, 1600-1750.