Écrits sur l’art Éditions MaculaÉcrits sur l’art Éditions MaculaÉcrits sur l’art Éditions MaculaÉcrits sur l’art Éditions MaculaÉcrits sur l’art Éditions MaculaÉcrits sur l’art Éditions Macula

Écrits sur l’art


August Strindberg (1849-1912) a non seulement mis à jour la violence des sentiments et la cruauté des mots dans son théâtre, ses romans mais il a aussi oeuvré en peintre et en critique d’art. Dans ses tableaux, d’où  l’humain est banni, une nature sauvage, rude emplit la toile. Rien de joli, d’aimable. Une matière étalée au couteau qui magnifie les éléments de la nature face à l’homme et qui le renvoie à son insignifiance. Une déclinaison de tonalités, une symphonie de couleurs. L’intérêt de Strindberg pour la peinture se double d’un travail de critique. Un oeil perspicace avec une connaissance de la scène artistique nordique et une curiosité pour ce qui se passe ailleurs en Europe.

Formé par des cours d’esthétique à l’Université d’Uppsala, il étudie avec méthode les différentes théories esthétiques, lit ce qui est publié, se frotte aux classiques. Il s’intéresse à ce que produisent ses contemporains. Et subit l’attraction de Paris. Il y séjourne à plusieurs reprises, fréquente les cercles artistiques, découvre les impressionnistes naissants. Sa connaissance parfaite de la langue française qu’il pratique et écrit lui permet d’être publié sur place. Il voyage en Allemagne, en Suisse. Compare les peintres suédois influencés par l’école française, celles de Düsseldorf, de Munich. Et s’élabore peu à peu un corpus d’articles mettant en opposition la peinture française, produit du climat tempéré à une peinture suédoise, nordique plus âpre, plus rude. Aussi Strindberg développe une curiosité pour l’expérimentation photographique, nouveau média dont il comprit tout de suite les possibilités et comment les explorer grâce à son intérêt pour la chimie. À certaines périodes de sa vie, Strindberg éprouve un profond doute sur l’utilité sociale de toute activité artistique. Ses convictions à la fois politiques et sociales alliées à une sévère misanthropie l’amènent à un rejet de toute expression. Mais perdurent ces textes, ces analyses, dont vingt-six sont à lire au sein du présent recueil.

Jean Louis Schefer, écrivain, philosophe et critique d’art, s’est imprégné de ces textes « écrits pour un public à éduquer et non pas à satisfaire » et en a tiré une préface éclairante, où la langue de Strindberg fait écho à la sienne. Par la richesse de sa pensée et de son lexique, il dégage toute la poésie des Écrits sur l’art de Strindberg.


Du romantisme au réalisme


Le XIXe siècle est devenu le champ clos où s’affrontent les historiens d’art. Les uns, les modernistes, sont partisans d’une analyse formelle qui prend son départ dans l’œuvre même ; les seconds, les révisionnistes, ont entrepris de bouleverser la généalogie de la peinture, soit pour y réintroduire les courants officiels et mondains (académisme, pompiers), soit pour faire du contexte social et particulièrement de la commande (officielle ou privée) le moteur de la production artistique.
Si opposés soient-ils, ces deux courants se réfèrent d’abondance au livre fondamental publié par Léon Rosenthal en 1914. Du Romantisme au Réalisme traite à la fois des conditions sociales de la production culturelle entre 1830 et 1848 – rôle de Louis-Philippe et de l’idéologie nationale, résistances de l’Institut, expansion des Salons, querelles d’ateliers – et des qualités esthétiques qui ont fait de Delacroix, d’Ingres, de Chassériau les phares de l’École française.

Dans une analyse qui va jusqu’au détail de la couche et de la touche, l’auteur définit les grands courants du siècle : romantique, « abstrait » (Ingres) et « juste-milieu ». C’est Rosenthal qui mit en circulation cette dernière notion pour situer Horace Vernet, Delaroche, et les divers tenants d’un compromis historique entre les tendances majeures du moment.
D’autres chapitres sont consacrés au triomphe du paysage et aux précurseurs de l’impressionnisme, à la renaissance de la peinture monumentale, qui jouit d’un âge d’or avec Delacroix, Chassériau, Flandrin, etc. – enfin à la recherche d’une peinture démocratique, voire édifiante, qui préfigure et accompagne la révolution de 1848.

Dans son introduction, Michael Marrinan, depuis 2004 professeur d’histoire de l’art à l’Université de Stanford, Californie, rend justice au précurseur que fut Rosenthal.
Né en 1870, mort en 1932, agrégé d’histoire, directeur des musées de Lyon, Léon Rosenthal a notamment publié un David, un Géricault, un Daumier et un manuel sur la gravure.


La Peinture ancienne – Recueil Milliet


Ce livre est la réimpression d’un classique achevé en 1914, publié en 1921, sept ans après la mort de son auteur, Adolphe Reinach, tué dès le début de la guerre.
La Peinture ancienne est le premier volet d’un ouvrage gigantesque qui resta inachevé. L’auteur souhaitait réunir tous les textes grecs et latins relatifs à l’art. Seul le rassemblement des textes concernant la peinture et les peintres a pu être mené à bien. Mais il s’agit là d’une entreprise essentielle : on sait le rôle pilote joué par la peinture dans l’histoire de l’art antique, collection de chefs-d’œuvre disparus qui n’ont subsisté qu’à travers des textes, et qui – peut-être parce qu‘ils avaient disparu – n’ont cessé, depuis la Renaissance et jusqu’à nos jours, d’alimenter l’imaginaire des artistes et des écrivains.
Livre d’histoire, l’ouvrage de Reinach est lui-même devenu histoire. Les perspectives d’aujourd’hui ne sont plus celles de 1914. Il fallait donc à la fois le mettre à jour, c’est-à-dire en vérifier une à une les références, contrôler à l’aide des éditions les plus récentes l’appareil philologique, donner une bibliographie nouvelle, mais aussi situer le livre lui-même et son auteur dans le mouvement des idées et de la société. Adolphe Reinach, fils d’un homme politique célèbre, neveu de deux des plus illustres archéologues de son temps, n’est certes pas un personnage qui laisse indifférent.
Ce difficile travail de mise au point à été fait par Agnès Rouveret, archéologue, ancien membre de l’École française de Rome. Elle enseigne le latin à l’université de Paris X-Nanterre.


Turner. Peindre le rien


« On a dit de ses paysages que c’étaient des images du néant, mais très ressemblantes. » William Hazlitt, 1816.

Depuis qu’en 1966, Lawrence Gowing a organisé une exposition Turner au Museum of Modern Art de New York, il est communément avancé que Turner fut l’un des peintres anglais les plus révolutionnaires, précurseur des premiers impressionnistes ou encore de l’expressionnisme abstrait. Pour Lawrence Gowing, Turner est le peintre qui renverse la tradition occidentale.

Le premier texte de cet ouvrage, « Turner : imagination et réalité », reprend la présentation que Lawrence Gowing avait faite pour le catalogue de cette exposition de 1966. Il est complété par « Turner et les images du néant », un texte daté de 1963 paru dans Art News, centré sur les aquarelles du maître.
47 illustrations, dont 24 planches couleur, viennent enrichir ces deux textes incontournables de l’histoire de l’art.
​Le don critique exceptionnel de Lawrence Gowing (1919-1991) devait beaucoup à son expérience de peintre. De Gowing, les Éditions Macula viennent de rééditer Cézanne : la logique des sensations organisées.


De Bellini à Titien


De Rubens à Vélasquez, de Poussin à Delacroix (par le truchement de Véronèse), le génie européen a tiré sa substance de l’art vénitien du XVIe siècle. Un certain rapport à l’objet – et donc au concept – se défait en ces années décisives où c’est la notion de figure qui oscille : chez Giorgione, chez Titien, le brouillage progressif des contours annule l’opposition de la forme et du fond et suscite une surface sans hiérarchie, isotropique. L’aboutissement de cette manière est le Marsyas – magma, tableau informe au sens de Georges Bataille, surface où se joue dans un registre crépusculaire la contamination de la peinture et de la chair.
Tout au long de son livre, Johannes Wilde analyse ce moment. Il le repère dans les œuvres. Il n’est pas de ceux qui se contentent d’étudier les photographies. En héritier de l’école viennoise, il cherche le sens dans les parties matérielles du peintre – texture, forme, couleur, cadrage -, étudiant en particulier le tableau dans son contexte architectural et montrant comment, à Venise, le lieu d’exposition est un opérateur essentiel.

Johannes Wilde (1891-1970), d’origine hongroise, a été membre du cercle de Lukàcs, puis élève de Max Dvorak, à Vienne, lecteur de Hildebrand et Wölfflin. Assistant pendant quinze ans au Kunsthistorisches Museum de la capitale autrichienne, exilé en 1938, il enseigne pendant dix ans au célèbre Courtauld Institute de Londres. Ses deux spécialités étaient la peinture vénitienne et Michel-Ange. Il leur a consacré deux livres et quantité d’articles.


La Peinture et son public à Paris au XVIIIe siècle


Le livre de Thomas Crow fait surgir un nouvel acteur dans le débat sur l’art au XVIIIe siècle. Il montre comment se dégage, peu à peu, au sein de l’assistance composite du Salon, un public, avec ses partis pris et ses exigences, qui pèse de plus en plus sur le cours de la production et qui finit par la régenter. Pour la première fois, le public se révèle un agent décisif de l’histoire de l’art. Un ouvrage qui marque une rupture dans notre manière d’interpréter le XVIIIe siècle.

Né en 1948 à Chicago, Thomas Crow a été le directeur du Getty Research Institute, à Los Angeles entre 2000 et 2007 ; il occupe aujourd’hui la chaire Rosalie Solow d’histoire de l’art moderne à l’instituts of Fine Arts de l’université de New York. Il est l’auteur de nombreux ouvrages dont un seul avait jusqu’ici été publié en français : L’Atelier de David, Paris, Gallimard, 1997.


L’Atelier de Jackson Pollock


Un moment décisif de l’art contemporain, illustré par les célèbres photographies de Hans Namuth, prises en 1950 dans la grange de Long Island, où travaillait Pollock. Cinq essais critiques examinent à la fois l’œuvre du plus grand peintre américain et ses rapports avec la photographie.


Cézanne. La logique des sensations organisées


« Son optique était bien plus dans sa cervelle que dans son œil. »
Émile Bernard, 1907
Renversant la conception traditionnelle, notamment française, héritée de Joachim Gasquet, et dont Merleau-Ponty est encore tributaire, qui cherche dans les tableaux et dans les aquarelles de Cézanne une interprétation (lyrique, « géologique ») de la nature, Lawrence Gowing s’intéresse à la surface des œuvres. Comment sont-elles faites ?
Historien de l’art, mais aussi peintre, Gowing repère en praticien, chez le maître d’Aix, à la fin des années 1880, une « loi d’harmonie », une « logique des sensations organisées » (selon les propres termes de Cézanne).
Celle-ci ne peut s’obtenir que par une procédure régulière, une déclinaison scrupuleuse des teintes qui constituent méthodiquement le champ chromatique.
C’est ce que décrit Gowing : « Cézanne comprit instinctivement que, dans les temps nouveaux, le traitement était le tableau. »
Lawrence Gowing (1919-1991) était l’un des plus grands historiens de l’art britanniques. Ses livres sur Vermeer et Turner restent incontournables. Comme l’a écrit John Rewald : « Il n’y a aujourd’hui personne qui ait une connaissance plus intime, plus intense et plus lucide de l’œuvre de Cézanne. »


Ut pictura poesis


Ut pictura poesis : la formule d’Horace (« la poésie est comme la peinture ») a été paradoxalement inversée par les hommes de la Renaissance et de l’Âge classique. Pendant trois siècles, de Léonard à Reynolds, la peinture s’est flattée d’être « comme la poésie » : subordonnée à la littérature, dont elle a tiré ses sources d’inspiration et sa raison d’être.
Cette rencontre se défait au dix-huitième siècle : affirmation d’un réalisme qui entend puiser ses thèmes directement dans la nature ; théories du génie et du sublime qui autorisent les excès de l’expression individuelle ; travail des philosophes qui, tel Lessing (1766), veulent dégager la spécificité de chaque pratique artistique ; autonomie croissante des constituants picturaux : couleur, texture, surface, etc.
Pour nous conter l’histoire de cette transformation, l’auteur procède par rapprochements, citations, références ; il explicite tour à tour la théorie de l’art en Italie (de Dolce à Bellori), la doctrine de l’Académie et de ses adversaires (Félibien, De Piles, Du Bos), enfin les débats en Angleterre autour du magistère de Reynolds à l’aube du romantisme.

Rensselaer W. Lee (1898-1984), ancien élève de Panofsky et W. Friedlaender, professeur à Columbia et à l’université de New York, était un spécialiste de la Renaissance et du Baroque. Maurice Brock, qui a traduit et mis à jour l’ouvrage de Lee, enseigne l’histoire de l’art à l’université François Rabelais de Tours.


De Pictura (1435) | De la Peinture


« Celui-là ne deviendra jamais un bon peintre s’il n’entend parfaitement ce qu’il entreprend quand il peint. Car ton arc est tendu en vain si tu n’as pas de but pour diriger ta flèche. »
De la Peinture, Livre I

Le De Pictura de Leon Battista Alberti (1404-1472) est le texte fondateur de la peinture occidentale moderne.
Savant, peintre, architecte, défenseur de la rationalité et figure centrale de la première Renaissance, Alberti réunit en un court traité le savoir de ses amis florentins : Brunelleschi, Donatello, Ghiberti…
En trois parties qui sont comme autant de recouvrements successifs du panneau ou de la fresque, Alberti instaure – par delà les recettes d’atelier – quelque chose comme un protocole de la peinture. Sous sa plume, le tableau devient alors la fenêtre à travers laquelle on contemple, non le monde, mais une histoire.

Les tensions qui parcourent ce texte – statut de la couleur, physique ou symbolique ; prélèvement réaliste ou figures idéales ; efficience de la lumière ; ambivalence de la surface en tant qu’aplat et profondeur – traverseront toute la pratique de la peinture jusqu’à la rupture du XIXe siècle (Delacroix, Manet, Cézanne).
Jean Louis Schefer, écrivain et théoricien, auteur d’ouvrages sur saint Augustin, Uccello, Corrège et Le Greco, procure une traduction qui obéit aux exigences scientifiques modernes (l’original figure en regard) sans pour autant sacrifier l’ample mouvement de la syntaxe latine.

Sylvie Deswarte-Rosa, directeur de recherche émérite au CNRS, tire dans une introduction érudite le portrait inattendu d’un Alberti mélancolique. Elle dessine l’organisation rhétorique du texte, inspirée de Quintilien, et propose une bibliographie qui retrace, depuis le XVe siècle, la fortune du De Pictura et les résistances qu’il a suscitées.